Discours de Brice Hortefeux lors de la remise des Prix de l’intégration et du codéveloppement

3 juillet 2008

Monsieur l’ambassadeur du Sénégal,
Mesdames et Messieurs les membres du corps préfectoral,
Mesdames et Messieurs les membres du jury du prix de l’intégration et du codéveloppement,
Mesdames et Messieurs,

Je suis très heureux de vous accueillir ce matin dans ce ministère pour la première remise des Prix de l’intégration et du codéveloppement.

Nous sommes réunis dans un lieu chargé d’histoire. Cette maison de la République, l’Hôtel de Rothelin-Charolais, a hébergé par le passé des institutions aussi prestigieuses que le ministère de l’intérieur, le Conseil d’État, et l’ambassade d’Autriche-Hongrie.

Pour avoir été successivement une maison de l’ordre, de la loi et de la diplomatie, ce lieu était tout désigné pour accueillir le premier ministère régalien à être créé depuis plusieurs décennies. Il est donc depuis un an le siège du ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire.

Être ministre de l’intégration, c’est favoriser le parcours d’intégration des immigrés de notre pays et c’est combattre le communautarisme. Être ministre du développement solidaire, c’est aider aux progrès économiques de pays sources d’immigration par le soutien à des projets concrets. Afin de répondre à ces deux défis que son l’intégration et le développement, j’ai estimé qu’il fallait montrer, récompenser et valoriser des parcours et des expériences exemplaires. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité créer, pour la première fois, les prix de l’intégration et du codéveloppement. Par ces prix et sur la base de candidatures volontaires, nous soutenons des hommes, des femmes, des associations et des entreprises qui ont su montrer l’exemple.

Ces prix n’ont pas vocation à illustrer l’exceptionnel, ils rappellent seulement une vérité : il est possible de faire beaucoup même en partant de peu. Ils ne sont donc pas des brevets de bonne intégration ou de codéveloppement, mais seulement des exemples de réussites authentiques.

1. Tout d’abord pour que ces prix puissent voir le jour, il a fallu établir des critères

A. Nous avons choisi de récompenser trois formes de réussite.

Premièrement, le prix du parcours d’intégration réussie, qui s’adresse à des personnes physiques et qui permet d’illustrer des réussites d’immigrés dans tous les domaines de la vie sociale.

Nous avons choisi ensuite de créer un prix du soutien à l’intégration. Par ce prix, nous avons voulu distinguer des personnes physiques ou des associations qui facilitent l’intégration d’étrangers en France. Concrètement, ils aident à l’apprentissage de la langue française, à l’accès à l’emploi, la création d’entreprise, la promotion des femmes et l’accès à la culture ou aux sports.

Enfin, nous avons créé un prix du codéveloppement pour récompenser des opérations individuelles de retour au pays ou des actions de développement local portées par des associations de la diaspora.

Parcours réussi, soutien à l’intégration, action de développement local : vous le voyez, nous avons voulu honorer des expériences, des initiatives et des démarches concrètes, authentiques et salutaires.

B. Concrètement, comment avons-nous fait ?

Nous avons, grâce aux relais des préfectures et des consulats, lancé un appel à candidatures il y a trois mois. Je remercie les membres du corps préfectoral, ici présents, pour avoir su jouer le jeu et faire preuve de réactivité. Les préfectures et les consulats ont pu ainsi faire remonter 136 dossiers. J’en profite aussi pour remercier tous celles et ceux qui, au sein de notre administration, ont œuvré pour que ce projet puisse voir le jour :

 la Direction de l’accueil, de l’intégration et de la citoyenneté (DAIC), avec son directeur Christophe BAY et toute son équipe ;

 la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (CNHI), qui a participé aux travaux de sélection ;

 l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (ACSé), qui a contribué au financement de ce prix ;

 Et enfin, l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), qui a notamment contribué à l’instruction des dossiers et au transport des lauréats.

2. Pour choisir les lauréats parmi les dossiers présélectionnés, il a fallu composer un jury

J’ai voulu un jury divers, exemplaire et mobilisé. Il est composé :

 d’une personnalité que chacun connait pour avoir suscité le rêve de millions de personnes grâce à son jeu de jambes et, surtout, son jeu de tête, Basile BOLI ;

 des hauts fonctionnaires qui œuvrent chacun pour l’intégration et l’égalité des chances, je pense à Blandine KRIEGEL, présidente du Haut Conseil à l’intégration et Alix de la BRETESCHE, présidente de l’ACSé ;

 d’un entrepreneur au succès remarqué, je pense à Malamine KONÉ, fondateur de la société de vêtements de sports, Airness ;

 du grand cuisinier, Serge VIEIRA, qui œuvre en Auvergne ;

 de deux écrivains, l’essayiste Gaston KELMAN et le romancier Ahmed DICH ;

 enfin d’un artiste, le chorégraphe Gang PENG.

Je tiens aussi à remercier deux membres du jury qui n’ont pas pu être présents ce matin :

 Claude BÉBÉAR, personnalité incontestée du monde des affaires et père de la Charte de la diversité ;

 Aziz SENNI, cofondateur du fonds d’investissement pour les banlieues, « Business Angels des Cités » (BAC). C’est lui qui avait écrit L’ascenseur social est en panne, j’ai donc pris l’escalier.

Je sais que chacun s’est beaucoup investi dans sa mission, prenant à cœur chaque dossier et cherchant à sélectionner les lauréats de manière la plus équitable et impartiale qui soit. A chacun de ces membres du jury, je dis : merci !

Je souhaite que désormais, ce soit chaque année que de tels prix soient décernés par le ministre en charge de l’intégration et du développement solidaire. En en faisant un rendez-vous annuel, je voudrais que la remise de ces prix puisse aussi devenir un outil de motivation sur le terrain.

3. Les critères constitués et le jury composé, l’essentiel restait à faire : le choix des lauréats.

S’agissant du Prix du parcours d’intégration réussi, le jury a distingué :

 Madame Kyu Jeong JEON, qui vit en Corrèze, est arrivée en France de Corée du Sud en 2001 et a créé un restaurant gastronomique remarqué après avoir travaillé avec de grands chefs français (Alain DUCASSE et Joà« l ROBUCHON) ;

 Madame Mariam PARTSKHALADZE, arrivée également en 2001 de Géorgie, résidant dans la Drôme, s’est investie dans la création de collections de vêtements, son travail ayant été remarqué notamment par le grand couturier Christian LACROIX ;

 Monsieur Jean-Baptiste SUBAYI KAMUANGA, arrivé du Congo en 1985, qui vit dans le Maine-et-Loire, est chirurgien au CHU d’Angers dans le domaine de la cardiologie ;

 Madame Concesca NSENGA, qui vit dans le Pas-de-Calais, naturalisée en 2007, est arrivée comme réfugiée du Rwanda en 1997. Mère de 4 enfants, elle est aide-soignante et prépare le concours d’infirmière à l’école de la Croix rouge de Béthune ;

 Monsieur Florim MUAXERI, qui vit dans le Puy-de-Dôme, est arrivé à l’adolescence comme réfugié du Kosovo en 1999. Il a impressionné le Jury par l’excellente maîtrise qu’il a du français, devenu plus qu’une deuxième langue et qu’il écrit, m’a-t-on dit, parfaitement.

S’agissant du Prix du soutien à l’intégration, le jury a récompensé :

 L’association AL KALAM, qui travaille notamment sur la défense et la promotion des femmes dans les Alpes-Maritimes ;

 Madame Nora ATAMNA, qui favorise l’accès à l’emploi des jeunes filles des quartiers sensibles à Vesoul en Haute-Saône ;

 Les dirigeants de la SA SPANGHERO (du nom des célèbres rugbymen), qui organisent pendant les heures de travail, des cours de français pour ses salariés d’origine étrangère à Castelnaudary ;

 L’association GENERATIONS FUTURES, qui travaille sur l’intégration à partir du sport et l’organisation des fêtes locales dans les quartiers Nord de Marseille ;

 Le club des 1000 entreprises citoyennes d’Auvergne, qui développe la mise en relation d’entreprises avec les publics défavorisés en particulier dans les quartiers sensibles.

S’agissant du Prix du codéveloppement :

o Pour les opérations individuelles, le jury a souhaité récompenser tout particulièrement les jeunes diplômés qui font le pari du retour au pays. Il a honoré :

 Monsieur Abdoulaye DIOUF, qui a créé une entreprise de confection textile à Dakar au Sénégal ;

 Monsieur Brahima KANE, qui a créé une pharmacie à Bamako au Mali ;

 Madame Magatte SALEKH, qui a créé une entreprise piscicole à Keur Momar Sarr au Sénégal.

o Pour les actions associatives, c’est-à -dire le soutien à un projet de développement local par la diaspora, la priorité de l’eau s’est imposée au Jury. Il a ainsi distingué :

 l’association des ressortissants de Gambi Diaobé en France, qui a porté le projet hydro-agricole de Gambi Diaobé au Sénégal.

Ce sont ainsi 14 lauréats, 14 réussites qui sont promues et soutenues financièrement aujourd’hui. A chacun, bravo pour l’exemple que vous donnez sur le terrain !

4. Si, vous autres lauréats, êtes le témoignage d’expériences réussies, nous savons pourtant qu’en matière d’intégration comme de développement, il reste beaucoup à faire

Le chômage des étrangers en situation régulière en France reste trop élevé : son taux est de 22% pour les étrangers hors Union européenne. Les étrangers vivent par ailleurs beaucoup des difficultés des banlieues : 20% des étrangers présents en France y habitent, alors que la population immigrée en France représente seulement 8% de la population totale.

Que montrent les expériences que vous illustrez aujourd’hui ? L’importance de l’apprentissage du français, de l’exercice d’un emploi, de la capacité donnée par le système français de se former et de progresser. En tant que ministre en charge de l’intégration des immigrés légaux, je fais de la langue, de l’emploi et de l’éducation mes trois priorités.

Le choix qu’a effectué le Jury me semble aussi illustrer des priorités qui s’imposent à nous en matière de développement solidaire. En particulier, dans un contexte de crise alimentaire, je note qu’il a mis en avant des initiatives qui visent à améliorer la sécurité alimentaire des populations, sans oublier la santé et la volonté d’entreprendre.

Mesdames et Messieurs,

Les trois prix qui forment le prix de l’intégration et du codéveloppement vont maintenant être remis. Chaque lauréat va recevoir un diplôme spécialement conçu pour lui, ainsi qu’une médaille gravée par la Monnaie de Paris.

Chaque lauréat recevra également une gratification financière de 3000 € pour les personnes physiques à 5000 € pour les associations ou les entreprises. Les lauréats du prix du codéveloppement qui ne peuvent être parmi nous aujourd’hui parce qu’ils sont à l’étranger se verront remettre dès que possible leur diplôme et leur médaille par l’Ambassadeur de France de leur pays.

Je souhaite à tous les lauréats de poursuivre leur vie ou leur action avec la même ambition. Je leur demande aussi de témoigner, d’expliquer comment ils s’en sont sortis, ce qu’ils ont fait, ce qui peut encore être amélioré. Je demande, enfin, aux autorités locales et à tous ceux qui sont écoutés de parler d’eux. L’intégration n’est pas seulement le résultat de l’action publique. C’est aussi le fruit d’une démarche collective qui concerne toute la société.

Pour conclure, j’aurai un mot pour les nombreux candidats dont les dossiers n’ont pu être retenus pour cette session du Prix. Qu’ils sachent qu’ils ont aussi mes encouragements et mon soutien. J’ai demandé aux préfets des départements concernés et aux ambassadeurs de France de mettre en valeur leurs parcours ou leurs actions. Pour eux, comme pour vous tous, le combat en faveur de l’intégration et du développement n’est pas terminé.