Discours d’Eric BESSON, à l’occasion de la « Journée mondiale du réfugié », le lundi 21 juin 2010

21 juin 2010

Discours d’Éric BESSON,

Ministre de l’Immigration, de l’Intégration,de l’Identité nationale et du Développement solidaire

Accueil de réfugiés à l’occasion de la « Journée mondiale du réfugié »

 Seul le prononcé fait foi

Monsieur le Représentant du HCR,
 Monsieur le Représentant de l’OIM,
 Monsieur le Directeur général de l’OFPRA,
 Madame la Présidente de la Cour nationale du droit d’asile,
 Mesdames et Messieurs,

D’abord je voudrais vous souhaiter à tous la bienvenue dans ce Ministère, qui n’est pas seulement celui de l’immigration, mais aussi celui de l’intégration, et c’est d’intégration dont nous allons parler aujourd’hui. J’ai l’habitude d’aborder le sujet de l’asile, puisque comme vous le savez l’asile est une tâche essentielle de mon Ministère, qui représente 55% des crédits. Mais j’aimerais aujourd’hui pouvoir parler d’un autre sujet, à l’occasion de la « Journée mondiale du réfugié », qui en réalité était hier 20 juin, mais qui nous permet de nous réunir aujourd’hui.

Je voudrais saisir l’occasion de cette Journée pour parler de ceux et à ceux à qui notre pays a accordé sa protection, et qui sont ici devant moi. Tous ne sont pas dans cette salle puisqu’un peu plus de 150 000 personnes bénéficient de la protection internationale de la France, la quasi-totalité comme réfugiés statutaires. Les profils des réfugiés présents sur notre sol sont très divers, certains s’y trouvant depuis des décennies. Si les persécutions politiques et religieuses étaient prépondérantes dans les années 70 et 80, les conflits ethniques se sont développés dans les années 90, et aujourd’hui nous assistons à la montée en puissance des problématiques d’ordre social (excision, mariages forcés..). Les continents les plus représentés chez les réfugiés en France sont : l’Asie (40%), l’Europe (29%), l’Afrique (27%) et l’Amérique (3%). Les Sri Lankais constituent la communauté de réfugiés la plus importante avec plus de 20 000 personnes.

Les réfugiés ont vocation à s’établir durablement sur notre sol, à y prendre racine, et à acquérir la nationalité française, au terme d’un parcours d’intégration qui n’est pas tout à fait le même que celui des autres ressortissants étrangers en situation régulière. Car les réfugiés ne sont pas des étrangers comme les autres, arrivés par hasard sur notre sol ou simplement pour y faire des études ou y travailler. Ils ont souffert, de persécutions, de traumatismes, de la perte d’êtres chers, ils ont bravé des conditions parfois extrêmes pour fuir des zones où ils étaient menacés, parfois de mort. Et au terme d’un périple qui fait souvent froid dans le dos, ils ont trouvé refuge en France, pays qui les a accueillis, qui leur a accordé sa protection, en vertu de la Convention internationale de Genève de 1951.

Vous le savez, la France est une grande terre d’accueil, pas seulement pour les étrangers en besoin de protection internationale mais peut-être particulièrement pour eux.

Permettez-moi de rappeler quelques éléments de l’accueil spécifique que réserve notre pays aux réfugiés :

 tout d’abord au titre du séjour : ils bénéficient d’une carte de résident, de 10 ans, renouvelable de plein droit ;
 
 ensuite ils bénéficient du droit de se voir rejoindre par leur famille, selon une procédure dite de « réunification familiale » qui est bien plus favorable que la procédure de droit commun du regroupement familial, puisqu’elle n’est pas soumise aux conditions de ressources et de logement ;
 
 troisièmement leur accès à la nationalité française est facilité : le code civil dispense par exemple les réfugiés de la « condition de stage » c’est-à-dire en clair qu’aucune durée minimum de résidence en France ne s’applique ; par ailleurs, la condition de connaissance de la langue française est appréciée de façon plus souple que pour les autres étrangers ;
 
 quatrièmement, les réfugiés bénéficient d’un accompagnement spécifique et renforcé pour l’accès au logement et à l’emploi, en vertu de l’article L 711-2 du CESEDA.

Je voudrais insister plus particulièrement sur cette question essentielle de l’accès au logement et à l’emploi. Elle est au cœur de la réussite de l’intégration des réfugiés en France. Elle est donc au cœur de nos priorités et c’est pour cela que nous soutenons financièrement les programmes et actions qui y concourent, avec notre opérateur l’OFII et de nombreux partenaires associatifs.

Trois points me paraissent essentiels :

1/ l’approche spécifique de l’accès au logement et à l’emploi des réfugiés :
 Les réfugiés sont souvent dans une situation de plus grande vulnérabilité que la plupart des autres étrangers résidant sur notre sol, cette situation doit être prise en compte dans la préparation de leur autonomisation. L’autonomisation se saurait se limiter à l’ouverture des droits sociaux.
 Les réfugiés bénéficient, comme les autres étrangers primo-arrivants qui veulent s’intégrer durablement dans notre pays, du contrat d’accueil et d’intégration. En 2009, 97 736 personnes ont signé le CAI dont 12 317 réfugiés, soit 12,6% de l’ensemble des signataires. Les réfugiés sont particulièrement présents aux formations linguistiques (42% d’entre eux en ont bénéficié en 2009, contre 22% pour l’ensemble des signataires du CAI).
 Au-delà du CAI, le but de l’accompagnement spécifique des réfugiés vers le logement et l’emploi est de les aider à accéder à un logement autonome, si possible dans le parc privé, et à un contrat de travail, si possible à durée indéterminée. Un élément fondamental est de faire se rencontrer les besoins de main d’oeuvre sur l’ensemble du territoire français (alors que les réfugiés se concentrent en majorité en Ile de France) et les parcours d’intégration des réfugiés. La mobilité géographique est donc à cet égard essentielle.

2/ la fluidité du dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile :
 Lorsqu’ils ont obtenu le statut, les réfugiés n’ont plus vocation à demeurer dans le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile, dont vous connaissez par ailleurs la saturation compte tenu de la forte augmentation de la demande d’asile depuis 2008. Il est ainsi essentiel de faciliter les sorties de ce dispositif vers des logements de droit commun. Je l’ai rappelé, les réfugiés bénéficient pour cela d’un accompagnement spécifique. Les CPH (centres provisoires d’hébergement) peuvent être mobilisés dans un premier temps, dans les limites de leurs capacités (un peu plus de 1 000 places dans toute la France), mais l’accès à un logement autonome est grandement facilité quand il est possible de mobiliser des logements-relais. Mon Ministère soutient les programmes menés en ce sens par les associations, en particulier le programme «  RELOREF  » de France Terre d’Asile (qui bénéficie d’un soutien de 240 000 euros pour 2010) et le programme «  ACCELAIR  » de Forum Réfugiés (qui bénéficie d’un soutien de 80 000 euros pour 2010), montants auxquels s’ajoutent les financements du Fonds européen pour les réfugiés FER.

3/ la mise en réseau de l’ensemble des acteurs :
 Ce point est essentiel également : l’intégration durable des réfugiés dans notre pays nécessite la mobilisation de tous les acteurs, étatiques, locaux, associatifs, privés.
 Comment par exemple favoriser l’accès à l’emploi sans mettre l’accent sur la formation professionnelle ? Compte tenu des difficultés d’équivalence de diplômes, les formations professionnelles des réfugiés doivent favoriser la reconnaissance des qualifications. Je n’ignore pas les situations de déclassement professionnel dans lesquelles se trouvent parfois les réfugiés en France. Les parcours de formation professionnelle doivent aider à y remédier, en associant tous les acteurs : État, OFII, Pôle Emploi, associations, organismes spécialisés comme l’AFPA (Association nationale pour la formation des adultes). Je n’oublie pas non plus l’importance que représente le bilan de compétences proposé dans le cadre du CAI (plus de 60% des réfugiés signataires du CAI en ont bénéficié en 2009).
 L’accès au logement nécessite aussi une approche partenariale, qui est un véritable facteur de succès vers l’obtention d’un bail direct, dans le parc social ou privé. Les bailleurs sociaux participent en particulier fortement à l’intégration des réfugiés par le logement.

Pour conclure mon propos introductif, car je voudrais préserver du temps pour échanger avec vous, je rappellerais que nous ne sommes pas dans un monde idéal, et qu’il n’est pas et ne sera jamais facile d’être réfugié, où que ce soit. Mais notre pays, la France, fera tous les efforts nécessaires pour toujours renforcer l’intégration des réfugiés auxquels elle a accordé sa protection.

J’ai par exemple décidé d’améliorer les procédures de réunification familiale, dont les délais sont trop longs. La réforme est en cours d’élaboration.

En ce qui concerne le CAI, je tiens à ce qu’il soit en permanence adapté aux besoins de ses signataires, en particulier en matière d’apprentissage de la langue.

Pour l’accès à la nationalité française, j’ai annoncé la semaine dernière la généralisation de la réforme des procédures de naturalisation, et j’ai rappelé aujourd’hui que l’accès des réfugiés à la naturalisation était par ailleurs facilité.

Je continuerai à mener une action déterminée, multiple, en partenariat avec l’ensemble des acteurs, pour l’intégration réussie des réfugiés dans notre pays.
 Je vous remercie de votre attention.